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Vigilance et conditions de travail

Dans le monde moderne, le problème du maintien de la vigilance se pose avec de plus en plus d'acuité. En effet, le travail continu a tendance à se généraliser dans le milieu industriel, et la plupart des services doivent maintenant être accessibles aux utilisateurs jour et nuit. Par ailleurs, la tendance générale est de réduire le nombre des opérateurs et de concentrer leur travail sur les tâches de surveillance qui demandent de plus en plus d'attention. Le problème du maintien de la vigilance se pose donc chaque fois que l'on demande à une personne d'effectuer des tâches difficiles pendant des temps très longs ou à des moments de la journée et de la nuit où ses capacités à rester éveillée sont plus réduites.

En effet, les performances humaines sont fonction du niveau de vigilance et des capacités d'attention qui fluctuent avec l'heure de la journée. Dans certains cas, les conséquences des erreurs commises peuvent être très graves. Ce problème du maintien de la vigilance qui se pose pour toute personne au travail prend une dimension plus importante pour les personnes concernées par le travail de nuit ou le travail posté. De plus, la récente mise en place des 35 heures a parfois eu des conséquences imprévues sur la qualité du sommeil des salariés concernés.

 

Le travail de nuit

Quel que soit le type d'activité, le travail de nuit est plus pénible et demande un effort d'attention accru comparativement au travail diurne. La chute du niveau de vigilance qui se produit normalement au cours de la nuit entraîne une forte envie de dormir ou au minimum une réduction du niveau d'activité. Ces effets vont de pair avec une réduction des capacités d'attention et de perception des signaux ambiants qui peut conduire à l'erreur. La sensation de fatigue et le besoin de sommeil sont accentués par le fait que le travailleur de nuit est en état de réduction chronique de sommeil, car le sommeil pris au cours de la journée est toujours de durée inférieure au sommeil nocturne. Des catastrophes industrielles ou aériennes se sont produites au cours de la nuit, au moment où la vigilance est physiologiquement diminuée, comme celles des centrales nucléaires de Three Miles Highland aux Etats-Unis et de Tchernobyl en Russie.

Le système veille-sommeil de l'homme est conçu pour préparer l'organisme et le cerveau à dormir la nuit et à être éveillé le jour. Ces rythmes naturels rendent difficiles le sommeil pendant les heures diurnes et s'opposent au maintien de la vigilance les heures de nuit, même chez les personnes qui sont bien reposées. Il est même possible que le corps humain ne puisse jamais s'ajuster complètement à l'activité de nuit et au sommeil de jour, même chez ceux qui travaillent de façon permanente la nuit.

Le travail de nuit est particulièrement perturbant. Les travailleurs de nuit qui essaient de dormir pendant la journée sont souvent réveillés par des bruits, la lumière, le téléphone, les autres membres de la famille,... Tous éléments perturbateurs qui n'interviennent pas au cours du sommeil de nuit des travailleurs diurnes, protégés par les habitudes sociales qui maintiennent les bruits et les perturbations à un niveau minimum au cours de la nuit.

 

Travail posté et somnolence

Un grand nombre de professionnels pratique la journée continue avec des horaires en 3 x 8 heures ou décalés. La plupart de ces individus ont une durée de sommeil sur 24h inférieure à celle des travailleurs de jour. Près de 70% des travailleurs postés ont des difficultés pour dormir, et donc des problèmes de somnolence excessive. En effet, s'ils sont affectés par les conséquences du travail de nuit évoquées plus haut, ils sont aussi touchés par des problèmes proches du phénomène de décalage horaire, puisqu'ils vont devoir dormir soit le matin, soit l'après midi, ou enfin la nuit, ce qui perturbe leur rythme veille/sommeil et diminue leur temps de sommeil.

En supplément du cycle naturel veille-sommeil, des facteurs environnementaux peuvent influencer la somnolence chez les travailleurs postés. Les ruptures de rythme et la privation de sommeil sont à l'origine d'une somnolence excessive qui peut entraîner une augmentation du risque d'accident automobile (particulièrement lorsqu'ils conduisent pour revenir à leur domicile après une nuit de travail), une diminution de la qualité de la vie, une diminution de la productivité (le travail de nuit peut être plus lent et moins précis que le travail diurne, et il peut s'associer aussi à une augmentation du risque d'accident et de blessure au travail). Si l'adaptation n'est pas satisfaisante, le risque de dépression est important.

Pour en savoir plus sur les problèmes de vigilance des travailleurs postés, consultez le site de Sommeil Vigilance Somnolence 81 : http://www.svs81.org

 

La mise en place des 35 heures

La nécessité de répondre à une obligation légale de réduction du temps de travail a été ces dernières années l'occasion d'un foisonnement de négociations avec la signature d'accords de plus en plus nombreux contenant des aménagements de l'amplitude et des horaires de travail.

Les accords de modulation permettent de faire varier de façon conséquente la durée du travail en fonction des besoins de production : on travaille des journées plus longues en saison " haute ", et plus courtes en saison " basse ". Mais la saisonnalité est très variable selon les métiers, et les accords permettent à l'employeur de modifier les horaires avec des délais de préavis très courts allant d'une semaine à une journée ! Par exemple, dans le développement de photographies, ce qui fait une " saison haute ", c'est un week end bien ensoleillé, une grande manifestation sportive ou culturelle, le déplacement d'une personnalité, ou un accident spectaculaire. On modifiera alors les horaires le matin pour l'après midi ou la soirée.

D'autres accords prévoient la semaine de 4 jours, les jours de RTT, le forfait annuel en jours de travail (la journée pouvant alors compter jusqu'à 13 heures d'amplitude), le Compte Epargne Temps (on " épargne " des jours de repos pour se constituer ultérieurement un repos sabbatique)…

Si ces accords ont été signés, c'est qu'ils correspondent à un mieux aux yeux des signataires : adaptation des ressources aux besoins de production pour les employeurs, plus de liberté et de possibilités offertes aux salariés selon leurs représentants.

Mais ces variations d'horaire peuvent parfois se révéler néfastes pour les uns et les autres : des horaires irréguliers ou fortement décalés peuvent engendrer des troubles du sommeil et une moins bonne disponibilité pour la vie familiale et sociale ; et au travail, cela pourra se traduire par un manque de forme, voire de vigilance, et donc une baisse de productivité et une augmentation du risque d'accident.